TRAMWAY T1 A NOISY STOP

TRAMWAY T1 A NOISY STOP

- Rapport de la Cour des Comptes de novembre 2010

 

La Cour des Comptes vient de publier un rapport http://www.ccomptes.fr/fr/Publications/Publications/Les-transports-ferroviaires-regionaux-en-Ile-de-France très attendu sur les transports publics en IDF : ce rapport  d'une façon générale est accablant mais prend particulièrement comme exemple le tramway T1 pour dénoncer la manière dont sont réalisés les bilans socio économique.

C'est à partir de ce bilan qu'est déterminée la pertinence d'un projet par rapport à son intérêt général rapporté à son  impact sur les finances publiques et qu'il est décidé de le réaliser ou non.

L'extrait repris ci-dessous (que je vous invite à lire intégralement) ne nous surprend pas  : ce que nous dénonçons depuis des années est clairement dit et prouvé par la Cour des Comptes.

Le bilan socio économique du tracé actuel n'est déja pas fabuleux (même avec une forte fréquentation) mais celui du prolongement serait carrément négatif !!!!!

Extrait du rapport :

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2 - La faiblesse des méthodes d'évaluation des projets d'investissement

Au-delà, la procédure de sélection des projets réalisés par la RATP présente trois faiblesses, ainsi que l'illustre en particulier le cas des projets de tramways.



a) Les bilans socio-économiques ex-ante des infrastructures confiées à la RATP, figurant dans les documents communiqués au public ou même aux administrateurs de la RATP lors des phases successives de sélection, ne comportent aucun détail sur les deux principaux éléments qui constituent la quasi-totalité des avantages socio-économiques des projets. Il s'agit des gains de temps pour les usagers des transports collectifs et de ceux liés à la décongestion du trafic routier grâce au report modal. Ceux-ci ne sont donc pas vérifiables.

Or, les projets portés par la RATP, pas plus que les autres projets de transport collectif en Ile-de-France, ne donnent lieu à une contre-expertise indépendante de celle réalisée par les maîtres d'ouvrage.

Enfin, les bilans ex-post qui doivent être réalisés en application de la loi LOTI peuvent être tardifs : celui concernant le tramway T1 Saint-Denis – Bobigny a ainsi été réalisé en septembre 2003, soit près de 11 ans après sa mise en service.


b) Par ailleurs, si la RATP semble réaliser depuis fin 2009 un calcul de la rentabilité financière des nouveaux projets d'infrastructure, celui-ci n'est pas joint aux documents publics soumis à concertation, qui ne comportent qu'une évaluation de leur impact socio-économique. Il apparaît indispensable que la RATP estime et communique aux membres de son conseil d'administration la rentabilité financière des capitaux qu'elle investit dans les infrastructures, sans que ceci ne remette en cause la prise de décisions sur la base de l'évaluation socio-économique, notion différente, qui intègre l'impact non-financier des projets, dont la loi prévoit qu'elle fonde le choix des infrastructures.

  1. Au sein des évaluations socio-économiques, la valorisation des gains de temps est prépondérante. Elle détermine la rentabilité socio-économique des projets d'infrastructure de transport collectif, de deux façons : la valorisation des gains de temps des usagers de la nouvelle infrastructure et les gains de décongestion de la voirie par report d'automobilistes vers l'infrastructure de transport collectif. Or, deux types de biais semblent fausser son évaluation dans le cas des projets étudiés :

- l'objectif de vitesse commerciale est surestimé. Fixé en général à 20 km/h, il peine à être atteint pour les projets de tramway sur voirie. Hormis une capacité nettement supérieure, l'avantage des tramways n'est ainsi pas toujours évident par rapport à des bus en site propre, dont la vitesse commerciale peut atteindre 16 km/h ;




  • par ailleurs, dans le cas des projets étudiés, la RATP et le STIF ont constamment surestimé les reports de trafic de la voiture particulière vers les tramways, et partant le gain correspondant pour la collectivité dans le calcul de rentabilité socio-économique.


Au total, à supposer même que les prévisions de trafic des lignes nouvelles de tramways soient justes, leur rentabilité socio-économique est surestimée.


  1. La sous-estimation des coûts d'investissement tient à plusieurs causes :


  • l'optimisme des prévisions initiales, qui facilite la sélection des projets, notamment au stade de l'inscription du projet au contrat de projets Etat-région ;


  • - les retards de réalisation systématiques et parfois importants des opérations. Les prévisions réalisées au moment de la conclusion du contrat de projets Etat-région sont rarement, voire jamais, tenues. Il existe un réel problème de programmation et de tenue des échéances des projets franciliens, entre les travaux préparatoires du contrat de projets Etat-région et le schéma de principe des projets ;


  • - l'omission fréquente de dépenses réalisées par d'autres co-maîtres d'ouvrage que la RATP. Il peut s'agir, par exemple, des aménagements de voiries et aménagements urbains à la charge de collectivités publiques ou de déviations de réseaux financés par les concessionnaires ou exploitants. Or, comme le soulignait le conseil général des ponts et chaussées dans son avis de 2003 sur le bilan46 de la loi LOTI du tramway T1, du point de vue de la collectivité, c'est la totalité des dépenses se rattachant,directement ou indirectement, à l'opération de transport qui doit être prise en compte dans les bilans socio-économiques.

Il en résulte, pour plusieurs projets, des rentabilités socio-économiques élevées (entre 17 et 23 %) qui demeurent manifestement surévaluées malgré des révisions (cas des tramways T6, T3 et, surtout, des deux prolongements du T2).


De même, pour plusieurs projets en cours de réalisation, le taux de rentabilité socio-économique, estimé dans les documents préparatoires dans une fourchette comprise entre 8 et 11 %, pourrait finalement s'avérer à peine supérieur au seuil nécessaire pour que la collectivité accepte de financer une infrastructure (taux fixé en 2000 à 8 %). D'autres pourraient avoir une rentabilité socio-économique inférieure. C'est le cas du projet de tramway T8 (Saint-Denis–Epinay–Villetaneuse), du T5 (Saint-Denis-Garges-Sarcelles), du T7 (Villejuif–Athis-Mons–Juvisy) et du prolongement du T1 de Noisy-le-Sec à Val-de-Fontenay. L'application à ces projets de la méthode de calcul modifiée par l'instruction cadre de 2004 ne garantirait pas non plus leur rentabilité.


3 - Une illustration : le bilan du tramway T1 Saint-Denis-Bobigny


Le tramway T1 de Saint-Denis à Bobigny a été mis en service à la fin de l'année 1992, soit 4 ans après la date prévue. Le bilan de la loi LOTI réalisé en 2003 met en lumière la forte fréquentation du tramway (80 000 voyageurs-jour fin 2000), supérieure aux prévisions du schéma de principe de 1983 et correspondant à une multiplication par 2,5 au regard du trafic des trois lignes de bus précédemment en service sur ce trajet.

En revanche, ce bilan fait aussi ressortir un service rendu inférieur aux objectifs du schéma de principe sur deux points importants : la vitesse commerciale moyenne réelle n'est que de 17 km/h au lieu de 19 km/h et l'intervalle minimal entre rames est de 5 mn au lieu de 4 mn. La RATP considère que cette moindre performance en termes de vitesse commerciale, qui est un facteur important de la rentabilité socio-économique des infrastructures de transport, s'explique par les difficultés de gestion des priorités de feux à des carrefours entre trois gestionnaires différents. La mise en service de ce projet a permis un report modal notable d'anciens piétons (7,3 %), mais moins élevé que prévu pour le trafic automobile (3,7 % au lieu de 6 %).

Le coût de construction de l'infrastructure a finalement atteint 139,2 M€ (valeur 1985), soit un dépassement de 46 % par rapport au schéma de principe et de 25,3 % par rapport à l'estimation de l'avant-projet. Ce coût se décompose entre 102,2 M€ pour l'infrastructure et 37 M€ pour le matériel roulant.




Ces montants sont incomplets. Le coût du projet ainsi calculé n'inclut pas, en effet, les aménagements complémentaires financés par le département de Seine-Saint-Denis, soit 20,1 M€ en 1985 qui auraient dû être intégrés dans le calcul de la rentabilité socio-économique. Il ne prend pas non plus en compte le coût des déviations des réseaux des concessionnaires, soit 13 M€. La rentabilité est donc surestimée, même si la RATP fait valoir que le programme d'aménagements complémentaires décidé et financé par le département de Seine-Saint-Denis relève d'une logique de requalification urbaine et qu'il n'a pas à être imputé au bilan de l'infrastructure.

Au total, malgré un trafic supérieur aux attentes, le conseil général des ponts et chaussées révise fortement à la baisse la rentabilité socio-économique du T1, dont le taux de rentabilité, recalculé selon les méthodes actuelles du STIF avec l'intégration des dépenses omises, n'est plus que de 13,6 %, au lieu de 18,6 % prévus. Ce taux tombe même à 10 % si l'on respecte les valeurs préconisées par le rapport « Boiteux II » et adoptées par l'Etat. L'opération se révèle financièrement lourde pour la collectivité. Le conseil général des ponts et chaussées observe, en outre, que l'impact du tramway sur l'aménagement urbain et le développement local ne répond pas aux espérances initiales des deux principaux promoteurs du projet, l'Etat et le département de la Seine-Saint-Denis, hormis la requalification réussie de la route nationale 186.


En février 2007, le conseil d'administration de la RATP a en outre approuvé un marché de 23,7 M€ HT pour la rénovation des plates-formes des voies du tramway T1. Ces travaux, d'une durée de quatre ans, nécessitent la mise en place de bus de remplacement, dont le coût n'est pas indiqué. Cet important surcoût, lié à une erreur de conception initiale, réduit davantage encore la rentabilité socio-économique finale du T1.



  1. Le contenu des évaluations préalables qui doivent fonder la décision de réaliser un projet d'infrastructure est fixé par le décret du 17 juillet 1984. Il comprend une analyse des conditions et des coûts de construction, d'entretien, d'exploitation et de renouvellement de l'infrastructure ; une analyse de ses conditions de financement et, chaque fois que cela est possible, une estimation de son taux de rentabilité financière : une analyse des incidences du projet sur les équipements de transport existants ou en cours de réalisation, ainsi que sur leurs conditions d'exploitation ; un bilan des avantages et inconvénients entraînés par la mise en service de l'infrastructure comportant notamment le taux de rentabilité pour la collectivité calculée selon les usages des travaux de planification. Le taux de rentabilité pour la collectivité intègre des éléments qui ne sont pas inclus dans le coût du transport, tels que la sécurité des personnes, l'utilisation rationnelle de l'énergie, le développement économique et l'aménagement des espaces urbain et rural. Enfin, les diverses variantes envisagées par le maître d'ouvrage d'un projet doivent faire l'objet d'évaluations distinctes selon les mêmes critères. L'évaluation préalable d'un projet d'infrastructure doit indiquer les motifs pour lesquels le projet présenté a été retenu.'''''''''



17/11/2010
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